vendredi 1 avril 2011

Contenu manifeste


Le contenu manifeste du rêve est ce qui se rêve en tant que scène vécue. Ce sont les matériaux utilisés et scénarisés dans le rêve. Tout ce qu'on voit, ce qu'on entend, ce qu'on fait, ce qu'on sent, sont les éléments manifestes du rêve, c'est-à-dire le résultat d'un film projeté dans une salle. Mais ce résultat est le fruit d'un montage travail du rêve qui vise à transformer le contenu latent du rêve, c'est-à-dire son véritable sens. On pourrait comparer le rêve à un rébus : les images du rébus (contenu manifeste) dissimulent le véritable sens du message (contenu latent) qu'il convient de décrypter.
Dans le rêve, le contenu manifeste est l’ensemble des éléments rapportés par le rêveur, au travers de son récit. Le psychanalyste a pour tâche d’écouter le contenu manifeste pour mieux en comprendre le contenu latent.
On parlera de contenu manifeste pour toute production consciente et verbalisée.Le rêve, selon Freud, est la « voie royale » pour accéder à l’inconscient dont il postule l’existence.Le rêve est apparemment absurde, dénué de sens. Il se présente comme un enchaînement d’événements sans liens apparents. Mais :le rêve d’enfant est la réalisation explicite de désirs inassouvis; d’où l’idée que le rêve adulte serait aussi la réalisation déguisée de désirs inconscients  Pour interpréter un rêve, trouver son sens, il faut distinguer le contenu manifeste et le contenu latent.Contenu manifeste:
Scénario du rêve tel qu'il apparaît dans le souvenir que le rêveur en garde. Le contenu manifeste des rêves des adultes est souvent confus et absurde. Le sens du contenu manifeste n'apparaît que par sa mise en relation avec un contenu latent caché dont il est la manifestation symbolique.
Contenu latent:
Ensemble des pensées refoulées qui sont à l'origine du rêve mais dont le rêveur n'a pas immédiatement conscience. Le contenu latent est restitué à partir du contenu manifeste grâce à l'association libre des idées. Le contenu latent est le sens du contenu manifeste. Ainsi, le contenu manifeste est ce dont parle explicitement le rêve; le contenu latent est l’ensemble des pensées, désirs, etc. qui cherchent à devenir conscients mais qui subissent la censure du refoulement et sont donc transformés pour apparaître sous la forme du contenu manifeste.Le travail d'élaboration du rêve est le processus par lequel le contenu latent est transformé en contenu manifeste. C'est le travail de construction du rêve. Le travail du rêve est rendu nécessaire par la censure et le refoulement. Les images constituant le contenu manifeste du rêve présentent les pensées constituant le contenu latent de façon voilée : le travail du rêve est donc une forme codage pour contourner la censure. Contenu latent --------- Travail d'élaboration ----------> Contenu manifeste
Le contenu manifeste est le résultat d’une élaboration qui mobilise une « logique » propre à l’inconscient :• La transposition est une dramatisation : un souhait / désir est représenté par une image, une mise en scène. La dramatisations'accompagne de figuration, c'est-à-dire de la représentation métaphorique de relations conceptuelles et abstraites. Ex. :
- Représenter la causalité par la succession
- Représentation d'un lien logique (et/ou) par la contiguïté spatiale• La condensation est le fait que plusieurs éléments du contenu latent peuvent être concentrés sur un même élément du contenu manifeste qui est par conséquent "polysémique" (il a plusieurs sens). Ainsi, plusieurs pensées sont figurées par la même image. Le contenu manifeste du rêve est donc beaucoup plus court que son contenu latent. Cependant, l'inverse est aussi possible: il peut arriver que plusieurs éléments du contenu manifeste renvoient au même élément du contenu latent. On parle alors de dispersion. • Le déplacement : les détails anodins du contenu manifeste sont liés aux pensées latentes importantes (qui donnent l’essentiel du sens latent). Déplacement de l’intensité affective.Le travail d'analyse est l'inverse du travail du rêve. C'est le travail d'interprétation du rêve. Interpréter le rêve, c’est remonter du contenu manifeste au contenu latent. Mais comment faire ?- Principe du déterminisme psychique : ce qui vient spontanément à l’esprit a un rapport avec les idées refoulées ; la résistance du patient à dire ce qui lui vient à l’esprit est une marque qu’on se rapproche de ces idées.- Technique de l’association libre des idées: dire le plus librement possible ce à quoi le contenu manifeste du rêve fait penser devrait permettre, de proche en proche, de remonter du contenu manifeste au contenu latent.Par association libre des idées, le travail d'analyse restitue le contenu latent du rêve à partir de son contenu manifeste. Le rêveur est invité à dire sans auto-censure toutes les pensées évoquées par le contenu manifeste du rêve.       Contenu manifeste --------- Travail d'analyse ----------> Contenu latentLe travail d'analyse est nécessaire pour donner un sens aux rêves obscures et absurdes.Problème : quel est le critère de la bonne interprétation ?Critère de cohérence : la meilleure interprétation est celle qui maximise la cohérence des constituants du rêve. Mais cf. enquête policière : une interprétation cohérente des indices n’est pas la preuve de la justesse de cette interprétation (plusieurs interprétations cohérentes sont possibles). Cette condition est donc écessaire, mais pas suffisante.
Critère d’efficacité : la bonne interprétation est « celle qui marche », c'est-à-dire celle qui aide le patient à surmonter ses difficultés. Pour Freud, la visée thérapeutique est essentielle. Mais ce n’est pas parce qu’une interprétation permet de produire un effet que c’est la bonne (la coïncidence n’est pas exclue)
Dans l’antiquité, le rêve était considéré comme un message des dieux. Actuellement, le rêve est  considéré par les psychanalystes et psychologues cliniciens comme « la voix royale vers l’inconscient« , mais pour accéder à ce dernier, il est nécessaire de traduire ce que les psychanalystes et psychologues cliniciens appellent le contenu manifeste qui se compose de ce que nous pouvons raconter du rêve en contenu latent. En d’autres termes, le rêve fait références à des substitutions déformées d’éléments inconscients qui sont répréhensibles par la morale. Pour accéder à l’inconscient, il faut donc travailler à partir des associations que peut faire le rêveur puisque si le contenu peut échapper à la censure de notre appareil psychique, c’est parce qu’il se transforme. Le premier procédé de transformation du contenu latent en contenu manifeste est ce que les professionnels appellent la condensation. C’est-à-dire que lorsque l’on rêve d’un objet ou de quelqu’un, en réalité, plusieurs objets ou plusieurs individus peuvent se cacher derrière le contenu manifeste. Le deuxième procédé est appelé par les psychanalystes et psychologues cliniciens le déplacement. Le rêve accorde de l’importance à des éléments qui n’en ont pas en réalité pour dissimuler des détails qui eux, permettront de décrypter le rêve. Le troisième procédé est ce que les professionnels appellent le renversement en son contraire. Pour faire simple, le rêve qui n’est autre qu’une réalisation hallucinatoire d’un désir refoulé, est un rébus qu’il faut déchiffrer si l’on veut accéder à son contenu latent.Le cauchemar peut être interprété comme un échec du rêve dans le sens où c’est un rêve qui n’est pas été transformé. Si nous nous réveillons après un cauchemar c’est parce que les angoisses étaient trop intenses pour que notre conscience puisse les supporter.Les rêves répétitifs, quant à eux, sont, pour la plupart des rêves traumatiques qui se répètent afin de permettre à l’individu d’anticiper un traumatisme passé de manière hallucinatoire afin qu’il puisse l’appréhender de manière différente. C’est donc une tentative de guérison de l’appareil psychique.
 Freud s'intéresse au rêve car en tant qu'expression de l'inconscient, il permet d'accéder à des représentations refoulées.

Freud commence par l'analyse des rêves simples de l'enfance. IL s'attache à analyser les rêves de sa propre fille Anna. La nuit, elle rêve à voix haute et dit "Anna, fraise, grosse fraise, bouillie". De même, quand les enfants urinent au lit, ils rêvent qu'ils sont aux toilettes. D'ou la thèse : le rêve accomplit symboliquement le désir. La fonction du rêve c'est de continuer à dormir car si le désir n'était pas satisfait symboliquement, il réveillerait le dormeur. Le fait que les bruits extérieurs soient intégrés au rêve confirme cette hypothèse.
A l'age adulte, nous faisons encore des rêves simples. Par exemple : un patient de Freud dont la femme a un retard de règles rêve que sa femme a ses règles. Il se sent donc trop jeune et pas assez fortuné pour fonder une famille. Son rêve accomplit son désir de ne pas être père. A l'age adulte, nos rêves sont complexes, incohérents ou obscures, d'où l'hypothèse que ces rêves accomplissent symboliquement un désir refoulé. Le fait que les rêves soient oubliés au réveil confirment cette thèse. Ils accomplissent les désirs refoulés. Si les jeunes enfants ne font que des rêves simples, c'est que le surmoi est en cours de formation. L'inconscient se forme par l'éducation. L'hypothèse de Freud, c'est que dans le rêve, la censure opère par déformation, déplacement. Le désir inconscient va être a la fois déguisé et exprimé sous une forme symbolique. Si on rêvait directement au désir refoulé, il serait tellement choquant qu'on se réveillerait.


Il y aura donc deux contenus dans le rêve :
- un contenu manifeste, c'est le rêve tel qu'on le perçoit. Autrement dit, l'expression symbolique du désir
- un contenu latent, c'est le désir inconscient qui va être transformé, deformé par le contenu manifeste. Le rêve et le psychanalyste ont un rôle inversé. Le travail du rêve part du contenu latent pour lui donner une expression symbolique. Le psychanalyste part du contenu manifeste, le rêve tel que le lui raconte son patient et cherche à l'interpréter, à redescendre au contenu latent.
Le rêve opère par :
- déplacements : un symbole manifeste exprime une représentation inconsciente
- condensation : Quand un symbole manifeste exprime plusieurs représentations inconsciente latente
- figurabilité : ce sont essentiellement des images. Il y a donc une opposition entre les pensées inconscientes dans le rêve qui fonctionne par images et la pensée rationnelle qui elle est discursive, qui renvoie au discours. Il n'y a pas de pensée sans mot. Même quand je pense silencieusement, c'est par mots. Exemple : une patiente rêve qu'elle achète dans un magasin, un chapeau noir très cher. Pendant son analyse, elle raconte qu'elle est amoureuse d'un jeune homme très riche mais qu'elle est mariée à un vieil homme très malade. · il y a déplacement car elle désire inconsciemment la mort de son mari. Ce désir refoulé va être exprimé par la couleur du chapeau : noir. Il y a condensation car le chapeau exprime plusieurs choses. Son prix symbolise la fortune du jeune homme. Le chapeau exprime le désir de séduire. La veille, cette femme était passée devant deux chapeliers : le rêve puise dans les choses anodines qu'on a vu la veille, les symboles que vont exprimer l'inconscient. Dans le cauchemar, la censure n'opère non pas en déformant les contenus du rêve mais en modifiant nos rapports au contenu du rêve. On vit comme pénible quelque chose qu'inconsciemment on désire, ce qui rend la satisfaction du désir insupportable.

Karl Abraham Sauvetage et meurtre du père dans les fantasmes névrotiques
"Les " fantasmes de sauvetage " font partie des souhaits courants et désormais connus fournis par les névrosés depuis qu’en 1910 Freud a indiqué leur signification inconsciente et leur rapport avec le complexe parental. Dans ces fantasmes, le névrosé sauve d’un danger mortel tantôt son père, tantôt sa mère. Les fantasmes de sauvetage de la mère trouvent surtout leur origine dans la tendresse du fils, mais recèlent également d’après l’analyse de Freud le désir de donner un enfant à la mère. O. Rank les a étudiés tout particulièrement. De même que J. Harnik, il nous a permis de comprendre la survenue de fantasmes de sauvetage de la mère dans les œuvres des poètes.Pour le sauvetage du père, Freud a souligné qu’il exprime l’opposition du fils. Il a insisté sur leur forme d’apparition. le fils sauve souvent un représentant du père – le roi ou une personnalité en vue- d’un danger menaçant, ailleurs il donne l’exemple d’un fantasme typique de sauvetage du père sans l’analyser plus avant. Souvent, je rencontre le même fantasme chez mes patients et je peux supposer qu’il en est ainsi pour d’autres analystes. Je voudrais envisager leur contenu inconscient et leur symbolisme et montrer que l’opposition infantile que Freud a discernée n’est pas seule à l’œuvre. une analyse plus approfondie me semble de mise. Elle apporte d’ailleurs des aperçus très riches de l’inconscient du patient. Enfin, elle nous permet d’entrevoir les couches plus profondes des fantasmes voisins que nous verrons à titre de comparaison.Dans le fantasme que je considère, le patient s’imagine marcher dans la rue. Il voit à l’improviste, s’avançant à une vitesse vertigineuse, une voiture ou siège le roi (ou une autre personnalité en vue). Par une prompte décision, il maîtrise les chevaux, parvient à stopper la voiture et sauve ainsi le roi d’un danger mortel.Si nous considérons simplement le contenu manifeste du fantasme de sauvetage, il nous apparaît comme la contrepartie facile à reconnaître de la légende d’Œdipe. le névrosé sauve la vie du roi au lieu de la lui enlever, comme Œdipe. Au niveau du contenu manifeste, le danger de mort encouru par le roi est sans rapport avec le fils : celui-ci ne s’expose-t-il pas au profit du père ?Les points communs des deux fantasmes sont par ailleurs remarquables. Dans les deux cas, la rencontre avec le roi est le fait du hasard, et à chaque fois le roi s’avance en voiture.Si nous utilisons notre savoir et considérons que pour l’inconscient " roi " signifie père et " sauver " tuer, le fantasme de sauvetage recoupe largement la légende d’Œdipe. dans cette dernière, il est vrai, le massacre du père est dévoilé, mais cet aspect s’explique du fait qu’en surface le mythe traduit l’horreur d’un passé lointain. Chaque membre de la société qui a produit le mythe s’en sent consciemment très éloigné. En revanche, dans le fantasme de sauvetage, la personne propre du névrosé entre le contenu manifeste. La transformation de l’attente en sauvetage s’explique par une activité plus serrée de la censure.Le fantasme de sauvetage contient toute une série de particularités qui demeurent inexpliquées, lorsque nous avons reconnu dans le roi le père et dans le sauvetage un sens ambivalent qui comporte la destruction. Nous pouvons énumérer ces éléments de nature essentiellement symbolique :Le déplacement. La voiture. Les chevaux. Se jeter sur. La rue. La rencontre inopinée. L’arrêt de l’attelage. Si nous prenons le premier éléments, le déplacements, nous pensons à la signification symbolique sexuelle coutumière. Nous aboutirons à une couche de fantasmes latents ayants le sens : le fils devient inopinément le spectateur du coït du père.La signification des chevaux se révèle alors : ainsi nous apparaît de façon fort constructive la surdétermination de chaque élément. Dans les cas de fantasme de sauvetage que j’analysai, l’attelage était toujours composé de deux chevaux. Les animaux en mouvement symbolisent les deux parents. L’intervention du rêveur dans la situation nous dévoile alors son sens. Dans les rêves et les fantasmes mêlés d’effroi des névrosés, le coït – mais aussi bien l’onanisme – est figuré par un mouvement de plus en plus rapide qu’il est impossible de calmer ou de stopper. Pour mémoire, citons la peur qui saisit certains névrosés lors d’une descente de montage ou d’escalier. leur peur concerne le danger d’être pris dans un mouvement invincible, n’obéissant plus à leur volonté. Les mêmes patients ont peur du mouvement qui anime un véhicule qu’il n’est pas possible d’arrêter à loisir (train, etc.). ces patients résistent au danger qu’ils encourraient s’ils laissaient à leur libido la bride sur le cou, ne fût-ce qu’un instant. Mais ils déplacent leur peur à des situation bien appropriées à être le substitut symbolique du refoulé.Si la course effrénée des chevaux représente un acte sexuel, l’approche du fils qui les retient crée un empêchement à l’intimité des parents. L’intention de séparation des parents appartient aux manifestations pulsionnelles, conséquence du complexe d’Œdipe, que nous observons souvent. La censure a voilé cette intention ; à sa place apparaît le hasard de l’arrivée du fils au moment même du mouvement effréné.Alors que le contenu manifeste exprime le sens amical du fantasme de sauvetage, cette couche plus profonde a le sens d’une opposition ou Freud reconnut le thème essentiel du " sauvetage paternel ". ainsi, le contraste avec le fantasme du sauvetage de la mère nous apparaît mieux ; de même qu’alors le fils conçoit un enfant avec la mère, de même dans le fantasme qui nous occupe, il en empêche son père. La parenté étroite de ces représentations devient évidente. Ajoutons la tendance déjà mentionnée par Freud à être " quitte " avec le père au moyen de ce sauvetage ; maintenant, le père " doit " la vie à son fils comme le fils la lui devait.Mais cette analyse ne rend pas compte des multiples déterminations du cheval comme le fils la lui devait.Mais cette analyse ne rend pas compte des multiples déterminations du cheval comme symbole sexuel. Tout comme l’analyse des rêves ayant ce contenu, les associations montrent les significations de force virile, et d’organe sexuel mêle du cheval. Nous connaissons des symboles oniriques de même signification: la locomotive, l’automobile, le bateau à vapeur, ayant pour caractère commun la propulsion d’une puissance invincible. Le fils s’oppose-t-il avec succès aux chevaux effrénés ? il témoigne alors sa supériorité par rapport à la force virile du père, que son idéalisation admirative d’enfant avait élevé au rang de roi, c’est-à-dire au rang de l’homme le plus puissant.Mais en empêchant le père d’accomplir l’acte symboliquement indiqué –couche plus profonde du fantasme-, il lui dérobe de plus la virilité auparavant admirée. Le fantasme de sauvetage nous révèle à la fois la tendance parricide, la tendance à séparer les parents et celle de châtrer le père. La clinique analytique quotidienne nous enseigne à quel point les fantasmes de meurtre et de castration sont intimement liés. Nous reviendrons par la suite sur la symbolique de castration, en particulier sur la représentation de la supériorité génitale du fils. Auparavant, nous envisagerons une autre signification des chevaux et de la voiture du fantasme de sauvetage.Le roi qui incarne à l’origine la virilité idéale s’avance dignement en voiture. Celle-ci lui sert de moyen de transport. Les chevaux lui servent d’attelage. ce sont les symboles féminins (c’est-à-dire maternels). Les chevaux s’emballant expriment le désir suivant : la mère est complice du fils ; elle fuit le père Durchgehen, elle le met en danger de mort et le livre en quelque sorte au fils. Mais tandis qu’elle expose la vie du père, le fils tente de la sauver. Ce fils évite très effectivement ses sentiments névrotiques de culpabilité. Je rapporterai un rêve qui étaye cette conception.Il nous reste un dernier symbole : la rue ou l’incident se déroule. Dans la légende d’Œdipe, le meurtre n’est pas perpétré dans le palais royal mais dans la rue. Ce détail ne peut pas être sans signification royal mais dans la rue. Ce détail ne peut pas être sans signification. Nous connaissons le sens habituel de symbole génital de la rue. Si nous utilisons cette connaissance, le fantasme de sauvetage nous permet de relever un contenu fantasmatique jusque là non reconnu dans la légende d’Œdipe. La rue, lieu de discorde du père et du fils, se passe alors de commentaires. Mais la figuration de la dispute pour le sexe de la mère couvre deux fantasmes inconscients différents.Le premier est reconnaissable d’emblée. la lutte entre père et fils est un thème fréquent des mythes et des rêves. La légende d’Œdipe y ajoute par son symbolisme particulier la signification d’une compétition pour la supériorité génitaleLe roi Laïos n’est pas seul dans la voiture. Il est accompagné d’un cocher, d’un héraut et de deux serviteurs. Le roi et le conducteur tentent de chasser Œdipe. Celui-ci riposte en assenant un coup au conducteur. Alors le roi vise la tête d’Œdipe avec son aiguillon et atteint son front. Ainsi, Œdipe est provoqué à se ruer le roi avec son bâton. Il l’assomme et le roi tombe de voiture à al renverse. Il se produit alors une mêlée entre Œdipe et les serviteurs du roi qui se termine par la victoire du premier.Le récit par l’image est parfaitement explicite. Le coup sur la tête est un symbole typique de la castration. Œdipe ne se sert pas d’une arme à proprement parler, mais d’un bâton, contre l’aiguillon dangereux du père et se fraie ainsi son chemin vers la mère. Le nombre des vaincus souligne la supériorité du héros. Ils sont tous des reflets de la figure paternelle. Il est d’ailleurs à noter que c’est le père qui s’oppose en premier au fils, ce à quoi le fils répond par un premier coup adressé non au père mais au conducteur, c’est-à-dire à un représentant du père. Ce n’est que lorsque le père l’attaque que le fils se défend et le tue. L’épisode initial se répète ici : le père conteste la vie de son fils à peine né, de sorte que l’acte d’Œdipe a le caractère d’un règlement de comptes et s’en trouve atténué. Il est un fantasme névrotique typique qui ne situe pas le heurt entre père et fils à l’adolescence, mais dans le passé le plus précoce, c’est-à-dire à la période prénatale. Tout psychanalyste connaît ces curieux fantasmes ou le fils intra-utérin est témoin des rapports sexuels des parents. Certains rêves occupent une place particulière, ceux ou le rêveur veut franchir la filière génitale mais le trouve obstruées par le père (c’est-à-dire son sexe).Un de mes patients rêvait de sa venue en bateau par mer et de son entrée dans un canal.Le bateau s’enfonce dans la boue et se heurte à un charretier dont la voiture s’avance en sens inverse.Le bateau et la voiture sont facilement reconnus comme symboles sexuels masculins. La canal boueux, c’est l’intestin maternel (terre). La théorie infantile veut que la conception et la naissance empruntent cette voie.Le bateau venant de la mer nous évoque la représentation fréquente de la naissance des héros de légende. L’eau est le symbole le plus répandu de la naissance. Je ne m’attacherai pas aux déterminations individuelles de ce rêve, mais au symbolisme de la naissance caché dans le mythe d’Œdipe.Au moment de la rencontre fatale avec Laïos, Œdipe est à la recherche de ses parents toujours inconnus de lui. Dans le chemin creux, il rencontre son père qui s’avance comme le charretier du rêve de mon patient. Sans aucun doute, le mythe comporte ici un fantasme de naissance. Mais d’une certaine façon, le fils doit exclure son père du chemin pour parvenir à naître. Nous sommes encore ramenés au début de la légende, à l’oracle qui prophétisera à Laïos que son fils le tuerait et prendrait pour femme sa propre mère. A la suite de cette prédiction, Laïos expose son fils dans la montagne les pieds percés (symbole de castration !). le chemin d’Œdipe vers Thèbes est une deuxième représentation de sa naissance. C’est à nouveau le père qui s’avance, mais cette fois le fils tue le père sans le connaître – de même le nouveau-né doit faire la connaissance de ses parents.Dans le fantasme de sauvetage, ces tendances sont rendues méconnaissables par le refoulement et la déformation (renversement en son contraire) et cela bien davantage que dans la légende prise à titre de comparaison. Si l’analyse du fantasme de sauvetage nous donne des indications sur le contenu symbolique de la légende d’Œdipe, cette dernière éclaire les couches plus profondes et plus travesties du fantasme de sauvetage.Notre connaissance du fantasme de sauvetage et du mythe d’Œdipe peut être complétée. Les rêves à contenu de fantasmes de sauvetage paternel des névrosés livrent une nouvelle contribution. A titre d’exemple, voici le texte d’un rêve :" Je suis assis à la gauche de ma mère dans une petite voiture attelée à un cheval (dog-cart). Près de la voiture, à droite, à côté de la roue, mon père ; son attitude indique qu’il parle ou a parlé à ma mère ; mais on ne perçoit pas un mot et ma mère ne réagit d’aucune manière. Mon père est très pâle, il a l’air fatigué. Silencieusement, il se détourne et s’éloigne en direction inverse. Je le vois disparaître mais je m’attends à son retour et je dis à ma mère : nous pourrions aller je m’attend à son retour et je dis à ma mère; nous pourrions aller et venir, en l’attendant. Ma mère fait un léger mouvement avec les rênes qu’elles tient et le cheval se met doucement en marche. Peu après, je lui prends les rênes, stimule le cheval, et nous partons au galop. "l’initié reconnaîtra facilement l’origine œdipienne de ce rêve.Dans la voiture à deux places, le fils prend la place à gauche de la mère, place qui revient à l’époux. le père est écarté : il a l’air pâle et fatigué, il est silencieux, il disparaît. L’attente de son retour peut être considérée comme un effet de la déformation du rêve, nécessaire pour contourner la censure.Alors que l’exclusion du père est figurée avec une relative simplicité, l’autre aspect important de fantasme œdipien, l’union du fils et de la mère, est caché dans une symbolique compliquée qui retiendra notre intérêt.L’inceste est représenté par la course commune significative ; elle débute avec la disparition du père. Le rêve s’insère donc là ou le fantasme de sauvetage s’arrête : car il se terminait bien par la mort du père ; jusqu’alors, la mère a refréné sa libido et celle de son fils (le cheval). Lorsque le fils lui propose d’aller et venir (symbole des mouvements du coït), elle donne elle-même le signal et le cheval se met en marche (symbole de l’érection). suit le mouvement qui va s’accélérant et que nous comprenons comme il a été dit précédemment.Dans ce rêve, le cheval apparaît donc à nouveau comme le représentant de l’activité virile mais simultanément celui de la libido féminine et de plus comme symbolisant le pénis tout comme dans le fantasme de sauvetage. Il est à noter que, dans les deux cas, le fils se saisit des rênes, en quoi il s’approprie le rôle du père. L’escapade (durchgehen) constitue une conformité frappante des deux fantasmes. Dans le rêve, la mère s’enfuit avec le fils et cela au rythme de plus en plus accéléré du cheval tout comme dans le fantasme des chevaux qui s’emballent."



Freud :
Exemple d’interprétation d’un rêve : « le repas au saumon manqué »
 
« Vous dites toujours, déclare une spirituelle malade que le rêve est un désir réalisé. Je vais vous raconter un rêve qui est tout le contraire d’un désir réalisé. Comment  accorderez-vous cela à votre théorie? Voici le rêve :
« Je veux donner un dîner mais je n’ai pour toute provision qu’un peu de saumon fumé. Je voudrais aller faire des achats mais je me rappelle que c’est dimanche après-midi et que toutes les boutiques sont fermées Je veux téléphoner à quelques fournisseurs mais le téléphone est détraqué. Je dois donc renoncer au désir de donner un dîner. »
Ce qui vient d’abord à l’esprit de la malade n’a pu servir à interpréter le rêve. J’insiste. Au bout d’un moment comme il convient lorsqu’on a à surmonter une résistance elle me dit qu’elle a rendu visite hier à une de ses amies; elle en est fort jalouse parce que son mari en dit toujours beaucoup de bien. Fort heureusement l’amie est maigre et son mari aime les formes pleines. De quoi parlait donc cette personne maigre ? Naturellement de son désir d’engraisser. Elle lui a aussi demandé : « quand nous inviterez-vous à nouveau ? On mange toujours si bien chez vous. »
Le sens du rêve est clair maintenant. Je peux dire à ma malade : c’est exactement comme si vous lui aviez répondu mentalement : « Oui-da ! », je vais t’inviter pour que tu manges bien, que tu engraisses et que tu plaises encore plus à mon mari !  J’aimerais mieux ne plus donner de dîner de ma vie ! » Le rêve accomplit ainsi le voeu de ne point contribuer à rendre plus belle votre amie. [...] Il ne manque plus qu’une concordance qui confirmerait la solution. On ne sait encore à quoi répond le saumon fumé dans le rêve : « d’où vient que vous évoquez dans le rêve le saumon fumé ? » C’est répond-elle le plat de prédilection de mon amie. »
 
[Freud, L’interprétation des rêves, 1900, Ch 4, PUF1967,  p 133-35]

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